Un livre important pour ceux qui pensent que la barbarie ce sont les autres…..Voilà un livre choc, un électrochoc pour nos vies douillettes et leurs cocons d’indifférence égoïste. Non ! la barbarie, ce n’est pas les autres (pas seulement !) elle commence quand nous rejetons l’autre pour ne pas mettre en risque notre confort !
Antigone , ce n’est pas seulement du théâtre : elle est là au cœur de Beyrouth dans l’affrontement du (des) pouvoirs, des passions,des logiques interminables de la vengeance.
L’art peut il vaincre la haine et la logique mortifère de la spirale de la vengeance ? Ici il semble bien que non. Alors que reste t-il de ces logiques gestionnaires dérisoires, des soit disant « savoir être » et autres grammaires émotionnelles, qui prétendent maitriser les émotions et gérer les âmes!(cf. mon livre)
L’homme est nu. Il est seul face à sa responsabilité, à sa transpassibilité qui le convoque à la grandeur ou à l’anéantissement. Car le réel surgit du rien …. »(Il) est toujours ce qu’on n’attendait pas et qui, sitôt paru, est depuis toujours déjà là » (H.Maldiney). Voilà à quoi est confronté Georges le héro, je devrais écrire le Hérault! Car, aprés le bavardage odieux et dérisoire de ses années militantes, il est, juste au moment où il est frappé de mutisme comme Œdipe fut frappé de cécité, Celui à qui la Parole advient au milieu de l’horreur. C’est dans le refus de la parole impossible, la sidération du Silence, cette parole enfin pleine, que Georges s’abandonne à sa Vérité.
Que reste t-il de Dieu après Sabra et Chatila, après Auschwitz, que reste t-il de l’art, de la psychanalyse? Que reste t-il de l’homme? Cette question lancinante, à jamais sans réponse, a tué Bruno Bettelheim et, sans doute, Primo Levi.
Les pages sur le massacre et la torture par les milices chrétiennes (eh ! oui), sous le couvert de l’armée israélienne, de centaines de femmes, d’enfants, de vieillards sans défense dans les camps de Sabra et Chatila sont d’une puissance terrifiante. Rarement, un écrivain aura rendu l’horreur, l’odeur du sang, des chairs putréfiées, les corps torturés comme cela. La course hallucinée de Georges dans les charniers pour retrouver Antigone, son Antigone, donne la mesure de l’horreur absolue, de la haine absolue.
On en sort pas indemne ! Tsahal et Israël ont perdu leur âme !
Désormais, le héros ne peut plus rester le metteur en scène impartial d’une tragédie qui résonne désormais au plus prés du réel, le simple témoin voyeur. Il n’a plus le choix, il est rattrapé par le Destin : (son) Antigone est morte, violée, torturée. Seule sa mort après la transgression absolue du meurtre, rachètera sa culpabilité ou, peut être plus précisément,sa responsabilité impuissante.
La barbarie est là, …et pourtant chaque camp a ses propres raisons, ses propres martyrs, ses propres vendetta! la situation n’est pas manichéenne.
Voilà la malédiction d’œdipe qui s’abat sur Beyrouth. La barbarie est là tapie au fond de chacun de nous.
Au moment où nos sociétés repues ferment les yeux sur ces émigrés fuyant des guerres que nous avons largement instrumentalisées, Nous sommes convoqués à regarder en face le Visage de l’Autre qui nous interpelle dans son altérité radicale (Levinas): c’est bien ce que doit accepter un coach digne de ce nom avant de se refugier derrière ses grilles de lecture!
Il est nécessaire, indispensable de lire ce très beau livre.
Auteur du livre « Hippocoaching, Le cheval coach, quand le corps parle », EMS, 2015