Jusqu’ici, je n’ai pas fait le choix de commenter mes promenades de lecteur. Mais je crois important pour un coach de se coltiner avec des textes littéraires ou philosophiques. Après tout le travail fondamental du coach est de savoir « lire » et lire , si possible, autre chose que du pré mâché à travers des grilles de lecture.
Chacun à leurs manières le cheminement à travers ces différents textes m’a fait progresser, en profondeur, dans mon métier de coach.
Je réserve la première place, aujourd’hui, à Maurice Blanchot à travers ce tout petit texte. Qui n’a rien lu de Blanchot, cet immense écrivain, cette énigme, à l’influence fondamentale et qui fut l’ami intime de Levinas, ne sait pas ce que c’est que la littérature.
Lire Blanchot est une experience du lâcher prise: il faut laisser résonner (raisonner?) le texte pour toucher ces harmoniques profondes qui vous interpellent au plus profond de votre Etre. Une sacré métaphore du coaching quand il ne se veut pas strictement utilitariste. Faire lire à des apprentis coach « l’attente, l’oubli » permet de les décentrer de leur raison-raisonnante pour les faire entrer dans la pure phénoménologie du texte. Il y a tant de coach qui « n’écoutent » pas leurs clients!
Je recommande, aussi, pour commencer un autre tout petit texte: « L’instant de ma mort » où Blanchot rapporte son experience vécue des quelques instants avant qu’il ne soit fusillé par les allemands…il sera miraculeusement épargné au dernier moment.
Un bonheur d’humilité, de culture, de persévérance.. La grande aventure de Laborde racontée par Oury lui même. Jean Oury n’est pas un « ça va de soit! ». Pour la pensée dominante il est sans doute l’un de ces coupeurs de cheveux en quatre si encombrants. Pourtant il développe une réflexion toujours en relation avec ce qu’il y a de plus quotidien dans sa pratique.Une psychiatrie riche en voie de disparition! Où l’on voit que la culture peut (doit!!!) féconder la pratique. Et si les coachs avaient à en prendre de la graine: Qu’est qu’une institution « écoutante »? comment la psychiatrie institutionnelle peut elle interpeller notre pratique de l’entreprise? Qu’est ce que comprendre? qu’est ce qu’apprendre? Quel est ce fou qui vient nous interpeller au cœur même de notre humanité? Que nous dit-il de notre condition d’homme? Voilà ce qu’évoquent ces conversations à bâtons rompus entre Jean Oury et Marie Dupussé. On y croisera au détour des chemins Freud et Lacan bien sur mais aussi Tosquelles, Maldiney, Szondi, Peirce, Kierkegaard et bien d’autres…
A prendre trois fois par jour pour ceux qui sont plein de certitudes.
La (les?) spiritualité est à la mode. On en parle, on en tire des pratiques que l’on monnaye, on donne des leçons… Le « on » ici n’est pas anecdotique!.
Cette mode participe, ainsi, la plupart du temps de ce que Chogyam Trungpa nommait le matérialisme spirituel c’est à dire l’utilisation de la spiritualité (Zen, Yoga, méditation….) à des fins pratiques, marchandes ou spectaculaires (cf. le développement du marché du bien être!).
Ça marche aussi très bien avec la philosophie!
Voici un petit livre sur le Zen très dense qui devrait aider, avec simplicité,rigueur et vigueur, à remettre les pendules à l’heure.
Heidegger (malgré les polémiques, souvent douteuses d’ailleurs, qui l’entourent: il est tellement plus facile de penser « contre » que de développer sa propre pensée!) est l’un des rares auteurs, qui après Nietzsche, pense à la hauteur des enjeux de notre société mondialisée.
Alors, pour cheminer en toute connaissance de cause dans l’œuvre fondamentale du plus grand philosophe du XXeme siècle qui éclaire d’une lumière aveuglante le nihilisme contemporain……
En ce qui concerne la polémique sur Heidegger, dont je rappelle quand même qu’il fut l’ami d’Hannah Arendt, de Jean Beaufret et de René Char, ces derniers de vrais résistants et tous trois peu soupçonnables de crypto nazisme, et pour vous faire votre propre opinion, il est interessant d’écouter la conférence de François Fédier (https://www.youtube.com/watch?v=geEedsjgrOk#t=10) qui se livre à une lecture des textes incriminés à la hauteur des exigences philologiques de Heidegger qui n’écrit jamais un mot au hasard!
Bon, un peu éclectique tout ça! mais j’aime les jardins à l’anglaise où les sentiers se perdent pour mieux découvrir ici une source, là une fleur rare et dessinent pourtant une architecture globale ou plutôt une forme qui fait résonner du sens!
Lucien Lemaire